cancer «tous cancers

«Tous les cancers sont-ils bien dépistés ?»

La réponse du professeur Claude Dreux, pharmacien, docteur ès sciences.

Il est prouvé qu'un cancer dépisté très tôt peut être traité avec les meilleures chances de succès. C'est pourquoi de plus en plus de dépistages de masse sont organisés, notamment pour les cancers du sein et du colon. Il existe aussi des dépistages individuels, sur prescription médicale, pour les cancers de la prostate, du col de l'utérus et de la peau, dont le redoutable mélanome. Pourtant, on ne se fait pas assez dépister en France. Malgré la gratuité et des dispositions très favorables, comme le libre choix de son radiologue, seules 58% des femmes de 50 à 74 ans répondent au dépistage, généralisé depuis 2004, du cancer du sein. Or, il en faudrait 70% pour réduire de 25% la mortalité due à ce cancer, le plus fréquent des cancers féminins avec plus de 40 000 nouveaux cas par an. Comment faire mieux? En désamorçant d'abord la peur de la découverte d'un cancer, ce qui représente environ 6 cas sur 1000 femmes dépistées. En expliquant que l'examen clinique est insuffisant: la palpation des seins est beaucoup moins sensible que la mammographie. De plus, mieux vaudrait avancer l'âge du dépistage à 40 ans, mais c'est une question de coût pour l'Assurance-maladie!

Haro sur le cancer colorectal

Avec plus de 35.000 cas par an et 17.000 décès, le cancer colorectal fait peur. Son dépistage précoce constitue donc une priorité de santé. Il existe actuellement un dépistage organisé dans presque toute la France, avec le test Hémoccult®, préconisé tous les deux ans pour les hommes et les femmes de 50 à 74 ans… On comprend dans ces conditions que le taux de réponse au dépistage soit à peine de 35% alors qu'il faudrait 50% de participation pour réaliser l'objectif de réduction de la mortalité par cancer colorectal. Mais on ne comprend pas pourquoi, alors qu'il existe une méthode immunologique beaucoup plus sensible et spécifique, reconnue et recommandée par la HAS, l'on continue à écouler les stocks d'Hémoccult aux dépens de la santé publique.

Le cancer de la prostate tue -9000 décès pour 60.000 cancers diagnostiqués par an- et comporte aussi des risques de métastases graves et douloureuses, osseuses notamment. Mais le dépistage précoce et fiable qui existe ne fait pas l'unanimité, d'où un déficit de patients dépistés. L'Association française d'urologie (AFU) conseille cependant ce dépistage par le dosage du PSA (antigène prostatique spécifique) et le toucher rectal à partir de 50 ans. En cas de doute, le mieux est de consulter son médecin traitant qui jugera de l'intérêt d'adresser son patient à un urologue, car la décision de traiter ou pas dépend de l'âge du patient, du type de cancer dépisté et des choix du patient concernant sa qualité de vie. Le dépistage du cancer du col de l'utérus apparaît plus satisfaisant avec une couverture d'environ 60% grâce à plus de 5 millions de frottis par an. Il est recommandé tous les trois ans pour les femmes de 25 à 65 ans vaccinées ou non et la loi HPST de juillet 2009 recommande un frottis systématique pour toutes les femmes enceintes. Le rôle des sages-femmes est essentiel en matière de prévention et de dépistage. Cependant, l'existence de deux vaccins contre le papillomavirus, responsable de cancers du col, recommandés chez les jeunes filles à l'âge de 14 ans (HPV), risque de réduire la fréquence du dépistage. Celui-ci est cependant indispensable, d'autant plus que les vaccins ne protègent pas contre tous les HPV.

Le mélanome : une priorité

Enfin, de tous les cancers, le mélanome est sans doute celui qu'il faut dépister en priorité, sachant que, dans ce cas, la prévention peut suffire à supprimer le risque. Le message est simple: pas d'exposition au soleil non contrôlée et jamais de séances de bronzage en cabine.