Le soleil pendant la chimiothérapie et la radiothérapie
Dr Jean-Charles GOEMINNE Service d’Oncologie – Responsable du secteur Chimiothérapie Clinique Ste Elisabeth, Namur
Nous avons besoin de lumière et de soleil. Aucun traitement, quel qu’il soit, ne doit vous empêcher de sortir.
Mais il faut savoir que certains médicaments anticancéreux rendent la peau plus fragile ou plus sensible à toutes sortes d’agressions, tel que la lumière du soleil.
Ce phénomène peut aussi être rencontré avec d’autres médicaments tels que certains antibiotiques.
Quelles sont les réactions que l’on peut rencontrer ?
- Une hypersensibilité de la peau au soleil avec un grand risque de brûlures. On parle d’une photosensibilité excessive aux rayons UV(A). Celle-ci est souvent inattendue et peut être douloureuse. Il y a aussi un risque de rappel. Ceci veut dire que la peau ayant présenté une brûlure est très sensible à une nouvelle brulure dans les semaines qui suivent la première. Les produits les plus photo-sensibilisants sont repris dans la liste ci-dessous (1). Les personnes à peau claire sont plus sensibles.
- Une hyperpigmentation : on bronze plus vite, aussi des taches qui auparavant étaient à peine visibles, peuvent devenir plus foncées. Parfois, toute la peau prend un aspect plus basané, même les endroits protégés du soleil. L’hyperpigmentation commence dans les 2 semaines après la chimiothérapie, mais peut ensuite persister pendant 2 à 3 mois après la fin du traitement. Les agents alkylants (2) sont souvent incriminés.
- Une hyperpigmentation du lit de l’ongle. Celui-ci peut présenter des stries ou des régions brunâtres. Elle disparait après l’arrêt du traitement avec la croissance de l’ongle.
- Des rougeurs ou un flush, par une dilatation des capillaires sous la peau. Beaucoup de produits de chimiothérapie peuvent donner cette réaction (3).
- Un rash cutané. Il peut ressembler à de l’acné ou à des petits boutons qui démangent et qui finissent par desquamer. Cette réaction est très souvent observée chez les personnes qui reçoivent un traitement « ciblé », tels que certains anticorps (4) ou certains traitements oraux (5).
Une série de conseils peuvent être utile pour prévenir des complications cutanées pendant la chimiothérapie:
- Il faut éviter l’exposition directe au soleil par le port d’une casquette, d’un chapeau, de vêtements qui recouvrent les bras et les jambes. On choisit les endroits ombragés.
- le soleil aux moments les plus chauds de la journée. Quand il est au zénith, les UV sont les plus dangereux. -
- L’application d’un bon écran solaire sur la peau exposée du soleil. Il est important de choisir les filtres solaires avec le plus haut indice de protection.
- Il faut éviter des savons qui dessèchent la peau. Des crèmes et des lotions hydratantes permettront à la peau de garder sa souplesse et d’améliorer sa résistance.
- Pour soigner les rashs cutanés il faut souvent des soins spécialisés, comprenant des préparations anti-inflammatoires et parfois antibiotiques. Pour diminuer les rashs évitons le soleil, mais pour les soigner, référez vous au médecin qui vous a prescrit le traitement en cause.
La radiothérapie est aussi responsable d’une hypersensibilité de la peau au soleil. Souvent, en fin de radiothérapie, la peau peut présenter des rougeurs qui ressemblent à un ‘coup de soleil’.
On parle de radiodermite aigue. Ensuite une hyperpigmentation peut apparaître. Pendant la radiothérapie il est impératif d’éviter le soleil sur la région du traitée.
La peau garde une photosensibilité prolongée après la fin de la radiothérapie. Il est conseillé de ne pas exposer les régions irradiées au soleil pendant un an, car celui-ci peut réveiller les réactions liées à la radiothérapie et il peut en résulter des séquelles.
(Les produits souvent utilisés dans les cancers digestifs sont soulignés)
1) Dacarbazine, fluorouracil ou son équivalent oral le Xeloda® et l’UFT®, methotrexate et vinblastine
2) Leukeran®, Endoxan®
3) Asparaginase, bleomycin, carboplatin, carmustine, cisplatin, cyclophosphamide, dacarbazine, docetaxel, doxorubicin, fluorouracil, lomustine, paclitaxel, procarbazine, et teniposide
4) Vectibix®, Erbitux®
5) Tarceva®, Tykerb®
Article paru dans la Revue Francophone de la Stomathérapie & Soins de plaies de l’AFISCeP – N° 7 – Juin 2009
AFISCeP