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L'eau du robinet n'aggrave pas le cancer

L'eau du réseau contient moins de nitrates, par exemple, que la charcuterie ou les légumes.

Trois académies s'insurgent contre la campagne lancée la semaine dernière par le WWF qui met en garde contre la présence de polluants dans le réseau.

«Imposture», «déstabilisation de l'opinion», «atteinte au respect des patients» : la charge est rude.
Dans une «mise au point» publiée jeudi, l'Académie nationale de médecine, l'Académie nationale de pharmacie et l'Académie de l'eau partent en guerre contre les recommandations faites aux personnes atteintes d'un cancer de s'abstenir de boire de l'eau du robinet.

La semaine dernière, en effet, le WWF, appuyé par une vingtaine de médecins et de biologistes, dont les professeurs Luc Montagnier, prix Nobel de médecine 2008 et Lucien Israël, mettait en garde contre la présence de divers polluants (nitrates, pesticides, substances médicamenteuses…) dans l'eau du réseau à des taux supérieurs aux normes autorisées «selon les régions et selon les périodes de l'année».
Et de suggérer aux personnes «malades du cancer ou qui sont passées par la maladie» de boire de l'eau en bouteille ou de s'équiper d'un filtre.

Ces recommandations, abondamment relayées par la presse, «constituent à la fois un déni de la science, un mépris de la médecine et une atteinte au respect des patients, écrivent les trois académies.
Les risques potentiels de l'eau potable dans la survenue éventuelle de cancers et l'aggravation de l'état des personnes atteintes de cancer ne reposent que sur des hypothèses dont l'accumulation ne suffit pas à faire une vérité scientifique. Aucune étude ne montre que l'eau du robinet présente un risque pour les malades du cancer.»

Pour le professeur André Aurengo, membre de l'Académie de médecine et chef du service central de médecine nucléaire du groupe hospitalier La Pitié-Salpêtrière, «il est malhonnête de faire croire, de manière aussi gratuite, à des personnes déjà fragilisées par la maladie qu'elles courent un risque et de les inciter à modifier leurs comportements sans que rien ne le justifie. Il y a une assimilation tendancieuse entre la détectabilité d'un polluant et sa dangerosité. Or les normes prévoient une marge de sécurité importante.»

«Des marchands de peur»

Contrairement à ce qui est affirmé dans le texte du WWF, le lien entre le cancer et les polluants incriminés, est loin d'être établi.

C'est notamment vrai pour les nitrates que l'on retrouve en quantité bien supérieure dans la charcuterie ou les légumes que dans l'eau du robinet…

«Faut-il également conseiller aux malades de ne plus manger de jambon ou de radis et, tant qu'on y est, de ne plus sortir de chez eux, à cause de la pollution de l'air, ou encore de n'utiliser ni téléphone portable, ni cosmétique, ni bouteille en plastique ?» tempête le professeur Yves Levy, de l'Académie de pharmacie et président de la section «eaux» du Comité d'hygiène publique.

«Ce qui se passe est inacceptable : le système est détourné par des marchands de peur dont les propos sont repris in extenso dans les journaux. Il faut réhabiliter l'expertise scientifique aux yeux de l'opinion afin de protéger les citoyens contre ce type d'impostures qui ne cessent de se multiplier.»

Les trois académies rappellent que même si «les ressources en eau sont exposées à diverses contaminations», l'eau du robinet en France, reste «l'un des composants les plus surveillés, les plus sains et les plus sûrs de notre alimentation.»

Le Figaro